Réglez votre succession avant votre décès

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Dr. Philippe Kenel

Docteur en droit, avocat à Lausanne et à Genève, Python

juin 4, 2021

Malheureusement, plus d’une fois, des problèmes d’héritage ont eu un effet négatif sur les relations familiales. Il n’y a pas que les relations de sang qui peuvent être affectées négativement, les mariages peuvent aussi s’effondrer à cause de cela. C’est pourquoi il est important de prendre les mesures correctes pour éviter ces énormes problèmes. De la planification du droit civil à la planification fiscale, toutes ces mesures doivent être soigneusement étudiées. Si vous ne savez pas comment vous y prendre, vous pouvez consulter des spécialistes qui vous aideront à prendre les bonnes décisions. Il est toujours préférable de penser à ces choses plus tôt que plus tard.

Pour en savoir plus à ce sujet, continuez à lire l’article du Dr Philippe Kenel.

L orsqu’un client me déclare qu’il entretient d’excellentes relations avec ses frères et sœurs, il m’arrive parfois de lui demander si la succession de ses parents est liquidée… En effet, il arrive malheureusement que des problèmes successoraux fassent éclater une entente familiale comme un coup de tonnerre dans un ciel sans nuage. Même si le défunt ne détient pas toutes les clés en ses mains pour éviter de tels éclats, il importe néanmoins qu’il fasse tout ce qui est en son pouvoir afin de planifier sa succession et d’en diminuer les effets.

De manière générale, la planification d’une succession nécessite une étude de la situation à la fois sous l’angle civil et fiscal. Vu que de plus en plus souvent le défunt, les héritiers et les biens ne se trouvent pas tous dans le même pays, il importe d’adopter une vision internationale.

LA PLANIFICATION CIVILE

A titre préliminaire, il est important de souligner que très souvent les personnes mariées oublient que la valeur des actifs qui se trouveront dans leur succession dépend très largement de savoir s’ils sont mariés selon le régime matrimonial légal de la participation aux acquêts ou s’ils ont signé avec leur conjoint un contrat de mariage modifiant certains effets de ce régime ou prévoyant celui de la communauté de biens ou de la séparation de biens.

Si l’intéressé décède sans avoir émis de vœu particulier concernant sa succession, le Code civil suisse prévoit comment celle-ci sera partagée. Par exemple, s’il décède en laissant un conjoint et des enfants, la moitié de la succession ira au premier et la seconde sera répartie entre les descendants.

La personne qui souhaite régler sa succession dispose, selon le droit suisse, de deux moyens. Tout d’abord, il peut rédiger un testament soit en l’écrivant à la main, en le datant et en le signant, soit en le faisant sous la forme d’un testament public ce qui nécessite l’intervention d’un officier public. L’avantage d’un testament est qu’il peut être modifié en tout temps et qu’il n’est pas nécessaire que les héritiers soient au courant de son contenu. Lors de la rédaction de son testament, il est primordial que son auteur ait à l’esprit que le droit suisse, contrairement aux droits anglo-saxons, connaît le système des réserves. Cela signifie que selon la situation familiale du défunt, ce dernier ne peut pas disposer librement de ses biens. Par exemple, s’il décède en ayant un conjoint et des enfants, il devra attribuer deux huitièmes au premier cité et trois huitièmes à ses descendants quel qu’en soit le nombre. En revanche, il peut disposer librement des trois autres huitièmes qualifiés de quotité disponible. Nous attirons votre attention sur le fait qu’un processus législatif est en cours, dont l’objectif est de diminuer les réserves à un huitième pour le conjoint survivant et à deux huitièmes pour les descendants ce qui aurait comme conséquence que la quotité disponible serait de cinq huitièmes. Le seul moyen de déroger aux règles en matière de réserve est que l’intéressé conclut avec ses héritiers sous la forme du testament public un pacte successoral. Il s’agit d’une forme de contrat par lequel le futur défunt et ses héritiers se mettent d’accord sur le partage de sa succession.

Personnellement, nous recommandons toujours à nos clients d’exprimer leurs dernières volontés. Cela permet aux héritiers de connaître exactement ce que voulait le défunt et de ne pas avoir à l’esprit à vie qu’il existait un testament qui n’a pas été retrouvé. Si la situation familiale est plus complexe, notamment en cas de famille recomposée, nous recommandons le recours au pacte successoral. Par ailleurs, nous préconisons, si la succession revêt une certaine complexité en raison du contexte familial, de la composition de la masse successorale ou des différents lieux de domicile des héritiers et de situations des biens, de nommer un exécuteur testamentaire, activité que nous exerçons fréquemment.

Sachez également que si vous avez des héritiers ou des biens à l’étranger que le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne ont édicté un règlement (Règlement (UE) No 650/2012) ayant trait notamment à la compétence et à la loi applicable en matière de succession et qui peut avoir des conséquences sur une succession même si le défunt était domicilié en Suisse.

Nous recommandons toujours à nos clients d’exprimer leurs dernières volontés. Cela permet aux héritiers de connaître exactement ce que voulait le défunt et de ne pas avoir à l’esprit à vie qu’il existait un testament qui n’a pas été retrouvé

LA PLANIFICATION FISCALE

Une personne planifiant sa succession aura souvent comme souci que le produit de ce qu’il a gagné et économisé pendant sa vie n’aille pas en trop grande partie au fisc. Il est d’autant plus important d’avoir cet élément à l’esprit lorsque le défunt est propriétaire de biens immobiliers à l’étranger, si des héritiers sont domiciliés dans des Etats imposant la succession au domicile de l’héritier ou que ces derniers sont des tiers sans aucun lien de parenté avec lui. En effet, de manière générale, on peut considérer que les taux d’imposition en Suisse sont, selon les cantons, très faibles voire inexistants entre conjoints survivants et en ligne directe, mais qu’ils peuvent atteindre des taux très élevés en cas d’absence totale de lien de parenté. Par exemple, dans cette hypothèse, le taux maximum dans le canton de Genève s’élève à 54,60%.

Pour comprendre la problématique de l’imposition fiscale des successions à l’échelon international, il faut avoir à l’esprit que les Etats sont libres d’imposer une succession selon les critères de leur choix dont les principaux sont le domicile du défunt, celui de l’héritier, le lieu de situation des biens immobiliers ou celui des biens mobiliers. De manière générale, les cantons suisses imposent les successions au domicile de l’héritier et au lieu de situation des biens immobiliers. Cela signifie que si une personne décède en étant domiciliée dans le canton de Vaud et qu’elle est propriétaire d’un immeuble dans celui de Zurich, la succession sera imposée dans le canton de Vaud à l’exception du bien immobilier qui le sera à Zurich. En revanche, d’autres Etats plus gourmands fiscalement, telle la France, imposent également les successions au domicile de l’héritier. Par exemple, si une personne décède en Suisse en ayant un enfant domicilié en France et qui l’a été six ans au courant des dix dernières années, sa part successorale sera imposée par les autorités fiscales françaises à un taux maximum de 45%, montant duquel il pourra déduire les impôts relatifs aux biens situés hors de France payés en Suisse.

Vu ce qui précède, nous conseillons toujours à nos clients qui souhaitent planifier fiscalement leur succession que l’élément essentiel entrant en considération sera leur lieu de domicile au moment de leur décès. Ils peuvent, si cela correspond à la réalité, changer de canton ou de pays. En second lieu, il sied d’étudier la composition du patrimoine et l’Etat où sont domiciliés les héritiers. Si les avoirs sont composés de biens immobiliers situés dans des Etats imposant lourdement les successions, il y a lieu d’envisager de les vendre. Dans l’hypothèse où un héritier est domicilié dans un Etat imposant les successions, comme la France, au domicile de ce dernier, il importe, à notre avis, que celui-ci soit conscient de l’importance du patrimoine du défunt et qu’en toute connaissance de cause, il décide, soit de conserver le même domicile, soit de déménager avant le décès dans un Etat à la fiscalité plus clémente.

Nous conseillons toujours à nos clients qui souhaitent planifier fiscalement leur succession que l’élément essentiel entrant en considération sera leur lieu de domicile au moment de leur décès.

En conclusion, même si une succession bien planifiée ne garantit pas la paix des familles, elle peut y contribuer. Par conséquent, nous vous recommandons, aussi bien sur le plan civil que fiscal, de consulter un spécialiste en la matière afin de prendre les bonnes décisions. Ne connaissant ni le jour, ni l’heure, mieux vaut, parfois, ne pas tarder…

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