Troubles érectiles et éjaculatoires

man and woman reading on the computer together

Dr. Alain Bitton

Urologues-Andrologues, Genève et Milan

mai 5, 2022

Le sexe est une partie importante de notre vie. Les troubles de l’érection et de l’éjaculation peuvent l’affecter négativement. Environ 20 % des hommes souffrent de dysfonctionnement érectile, et ce problème s’aggrave progressivement et est plus susceptible de se produire avec l’âge. Les gens pensent encore que le problème vient de la tête alors qu’il a été prouvé qu’il s’agit d’un mélange de problèmes organiques. Les facteurs de risque cardiovasculaire comme le tabagisme, l’obésité, le diabète et d’autres encore, ont tous un impact négatif sur l’érection. Le Viagra aide cependant à résoudre le problème de l’érection. D’autre part, nous avons les troubles de l’éjaculation. Ils comprennent l’éjaculation précoce, qui est le plus courant. Environ 28 % à 36 % des hommes souffrent d’éjaculation précoce.

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Panique à bord !

La sexualité est un paramètre important de la qualité de vie. Pourtant aujourd’hui, se confondent sexualité, sexe et amour. On parle plus volontiers de sexe c’est certain, mais le thème de la sexualité reste encore tabou et l’amour encore une notion vague et un idéal à atteindre, difficile à cerner surtout pour les hommes. Même si l’on a réussi depuis l’introduction du Sildénafil (le fameux Viagra) et des autres médicaments qui renforcent les mécanismes de l’érection, à mieux soigner et comprendre les troubles sexuels, notamment les problèmes érectiles et éjaculatoires, l’évolution des mœurs et de notre société semblent compliquer les relations humaines.

Le soignant se trouve quotidiennement alerté par une prise de conscience de plus en plus importante de l’impact que revêt la sexualité pour la vie de couple certes, mais surtout et aussi de l’angoisse qui hante de nombreux hommes notamment en cas de dysfonction sexuelle. L’angoisse d’en parler bien sûr, mais surtout l’incapacité de mettre des mots, de verbaliser, de s’exprimer ou simplement d’essayer de comprendre les mécanismes normaux ou pathologiques de la fonction sexuelle.

Flash-back sur les mécanismes de l’érection

L’érection est un mécanisme actuellement mieux compris. Il s’agit pour beaucoup d’hommes et ceci pendant de longues années, fort heureusement, d’un mécanisme physiologique et naturel permettant grâce à un automatisme très complexe et contrôlé par les centres cérébraux, d’obtenir une verge dure en réponse à une stimulation érotique ou sensitive. L’hypothalamus génère des influx et des stimuli qui, le long de la moelle épinière, vont rejoindre les nerfs érecteurs puis, les terminaisons nerveuses effectrices au niveau des corps caverneux et notamment de la cellule musculaire lisse. Cette stimulation aboutit à une relaxation du réseau de cellules musculaires lisses du pénis, formé par les deux corps caverneux. Le sang gonfle alors l’organe et arrivé à la pression maximale le système se verrouille. C’est le mécanisme de l’érection!

Les corps caverneux ont une structure très semblable, formant une éponge avec des connexions à travers les interstices. Au niveau de la jonction entre la terminaison nerveuse et la cellule musculaire lisse du corps caverneux, apparaît une libération d’un neurotransmetteur très particulier, le NO (oxyde nitrique) qui va, lors d’une cascade biochimique, aboutir à une augmentation du GMP cyclique, puissant vasodilatateur.

La dysfonction érectile : causes et répercussions sur l’homme

La prévalence totale de la dysfonction érectile est de 20 % avec une proportion augmentant fortement avec l’âge. En effet, environ 10 % des hommes de 40 à 50 ans sont concernés et 20 % des hommes de 50 à 60 ans. Les statistiques pour 2025 parlent de 325 millions de personnes dans le monde touchées par la dysfonction érectile. Pendant longtemps, tout le monde pensait que tout se passait dans la tête. En effet, Hippocrate ne disait-il pas que la femme était l’origine de l’impuissance masculine. Aujourd’hui, nous pouvons considérer que 70 à 80 % des dysfonctionnements sont mixtes avec une large part attribuée aux problèmes organiques tels que tous les facteurs de risque cardio-vasculaires comme l’obésité, le tabagisme, l’hypercholestérolémie, le diabète, qui sont de véritables tueurs silencieux de l’érection en détruisant la fonction oxydative de la cellule endothéliale du corps caverneux. Bien évidemment, à partir d’un certain âge, le vieillissement du corps caverneux et la diminution de la production de l’oxyde nitrique qui est le neuro-modulateur principal du phénomène de l’érection va jouer un rôle prépondérant dans le dysfonctionnement. Chez le patient plus jeune, il s’agira plutôt d’une angoisse de l’échec, d’une volonté de performance, d’une immaturité sexuelle ou d’une sexualité fragile. Hormis le fait de représenter un véritable baromètre de l’état de santé du patient, la fonction érectile a une immense importance pour l’homme et tout phénomène de dysfonction aura un impact catastrophique non seulement sur le physique, mais surtout sur la psyhé masculine et la vie de couple.

Qu’en est-il des traitements plus de quinze ans après les débuts du Viagra ?

La petite pilule bleue a fait du chemin! Après le Sildénafil qui a occasionné une véritable révolution dans le domaine de la prise en charge des patients atteints de troubles érectiles, d’autres médicaments tout aussi efficaces et très intéressants ont été mis sur le marché. A l’heure actuelle, les trois principaux traitements : le Sildénafil (Viagra), Vardénafil (Levitra) et Tadalafil (Cialis), ont – outre quelques petites différences structurales – la même efficacité et permettent de régler le problème dans 80 % des cas. Leur mécanisme d’action est très similaire au fonctionnement physiologique de l’érection. Ce sont des médicaments qui prolongent le temps d’érection en inhibant une enzyme très spécifique de la dégradation du GMP-Cyclique. Le Tadalafil a également été testé pour une prise quotidienne à 5 mg très intéressante pour les patients plus jeunes. Son utilisation à différents dosages est actuellement en pleine essor dans le traitement de l’hypertrophie bénigne de la prostate. Certains patients notamment atteints de diabète ou après chirurgie ou radiothérapie pour un cancer de prostate auront encore recours à l’utilisation d’injections intra-caverneuses de prostaglandines.

Norme et recherche de performance : le fiasco assuré

Bien que la sexualité représente une fonction physiologique non vitale, elle est pourtant ressentie comme vitale et primordiale pour beaucoup. Malgré les progrès tant médicaux que dans le domaine de la communication, beaucoup d’individus, même encore jeunes pensant qu’ils ne correspondent plus à une norme sexuelle ou de désir, s’accommodent de leur dysfonctionnement ou parfois se résignent d’emblée. La sexualité ne fait partie et ne devrait faire partie d’aucune norme. Sans être réellement nouveau, le domaine de l’anxiété face à la performance a pris de l’ampleur avec la mise en avant de la demande sexuelle des femmes et des relations homme-femme. En effet, jusqu’à il n’y a pas si longtemps, les femmes subissaient l’acte sexuel, la relation et même l’homme, diluant leur insatisfaction dans le renoncement ou l’adultère. Le mariage était bien souvent l’étape obligée pour accéder à la sexualité. Actuellement, plus indépendantes matériellement et physiquement les femmes veulent aujourd’hui conjuguer leur carrière à leur vie de femme, épanouissement maternel et sexuel inclus. Elles demandent un plaisir qu’elles fondent en droit et se donnent le droit de l’obtenir. La femme peut connaître actuellement et revendiquer le plaisir. De nos jours, les unions ne sont plus éternelles. Les partenaires ne sont plus dépendantes. Elles ont des expériences, elles comparent et souvent elles choisissent. L’homme devient alors « nu » et s’imagine qu’il ne bande pas bien, qu’il sera rejeté, moqué ou détrôné. Bien souvent, il préfère alors fuir plutôt que d’affronter le passage à l’acte. Le cerveau va alors anticiper l’échec et c’est le fiasco. L’aide à l’érection médicamenteuse devra alors souvent être épaulée par un travail sur soi aidé par une sexothérapie voire une psychothérapie. Il faudra alors lutter contre ces fausses normes et essayer de réhabiliter le couple à une sexualité assise sur l’écoute de l’autre et sur l’affectif. Il n’existe et on ne le répétera jamais assez aucun comportement normatif donc, exonéré de responsabilité.

Les problèmes éjaculatoires : ces tueurs de la vie amoureuse

L’éjaculation précoce, problème le plus courant des troubles éjaculatoires, est définie comme étant une éjaculation apparaissant dans la minute qui suit la pénétration. On estime aujourd’hui que l’éjaculation précoce concerne de 28 à 36% des hommes et représente le trouble sexuel et le motif de consultation le plus fréquent. Malgré sa fréquence élevée, l’étiologie de l’éjaculation précoce reste débattue. Au-delà de la description princeps de Kaplan qui donnait une explication psychodynamique centrée sur des tendances sadiques et narcissiques, la vision moderne de l’étiologie de ce trouble, serait plutôt une hypersensibilité pénienne. Plus récemment, des études plus pointues d’anatomie et de neurophysiologie ont permis de découvrir un rôle prépondérant de la sérotonine et de ses récepteurs à la base de nouveaux traitements très prometteurs.

Neuro-Anatomie & Neuro-pharmacologie de l’éjaculation

Les observations cliniques ainsi que les données anatomiques et pharmacologiques ont fourni une vision globale du contrôle autonome périphérique de l’émission: les mécanismes parasympathiques cholinergiques participent au contrôle de la sécrétion épi théliale des glandes sexuelles accessoires et les mécanismes sympathiques adrénergiques sont responsables de la contraction des fibres musculaires lisses du tractus séminal et du col vésical. Les deux phases de l’éjaculation sont médiées par des réflexes organisés aux étages spinaux thoraco-lombaires et lombo-sacrés.

L’étendue du réseau cérébral responsable de la réponse éjaculatoire implique la participation de différents neurotransmetteurs et neuro-modulateurs. Parmi ceux-ci, la dopamine, la 5-hydroxytryptamine (5-HT) et l’ocytocine (OT) jouent un rôle particulièrement important. Chez l’homme, les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS), qui augmentent le tonus sérotoninergique, ont un effet inhibiteur sur l’éjaculation et les récents essais cliniques montrent que leur utilisation représente une stratégie pharmacologique efficace dans le traitement de l’éjaculation prématurée.

Perturbation du couple et dimension de la relation

Pour de nombreux couples, le problème de l’éjaculation précoce peut représenter un véritable handicap à la vie amoureuse de loin plus gênant qu’un trouble érectile. Etonnement, beaucoup s’en accoutument. Pourtant, lorsque le patient est traité et pris en charge efficacement, la partenaire note une très nette différence et se rend compte de l’importance d’avoir traité le trouble éjaculatoire, car la qualité de la relation s’en trouve très nettement améliorée. En outre, ce phénomène, comme les troubles sexuels masculins en général, ôtent du plaisir parce qu’ils entrainent une anxiété de performance ou une angoisse anticipant l’échec. Etre persuadé d’être systématiquement un éjaculateur précoce va forcément concourir à vous donner raison ! Les partenaires des hommes présentant des éjaculations précoces rapportent significativement plus de dysfonctions sexuelles avec satisfaction réduite, détresse augmentée, difficultés personnelles et troubles de l’orgasme que celles des patients sans éjaculation précoce. La dimension de couple doit donc être encouragée et intégrée si possible dans la prise en charge, en utilisant des approches individuelles et de couples, et en associant les différentes thérapies à disposition (pharmacologiques, psychologiques, sexologiques, comportementales).

Traitements à disposition

Les traitements médicamenteux susceptibles d’améliorer l’éjaculation précoce ont fait l’objet de méta-analyses récentes. Seule la dapoxétine (commercialisée sous le nom de Priligy) a l’autorisation de mise sur le marché en Europe. La dapoxétine (30 mg et 60 mg) a été évaluée dans cinq études randomisées en double aveugle versus placebo chez 6081 hommes âgés de plus de 18 ans. Les résultats étaient excellents avec des prolongements des temps éjaculatoires satisfaisants pour les patients. Les effets secondaires les plus fréquents sont les nausées, les étourdissements ainsi que les céphalées. Les modes d’action potentiels de ces molécules sur l’éjaculation sont l’augmentation de la confiance en soi, de la perception du contrôle de l’éjaculation, de la satisfaction sexuelle globale et la diminution de la période réfractaire post-orgasmique permettant l’obtention d’une deuxième érection plus rapide. Parmi les autres traitements classiques, les anesthésiants locaux en application topique comme l’EMLA en utilisation à 5% quelques minutes avant l’acte sexuel reste un traitement de fond très utile, même si son utilisation n’est pas toujours très pratique. Il a l’avantage d’être simple, reproductible et sans effet secondaire important. Quel que soit le traitement médicamenteux, les sexothérapies sont également importantes dans la prise en charge globale du patient éjaculateur précoce et de son couple. Les thérapies les plus utilisées sont à visée comportementale permettant de faire ressentir au patient son point de non-retour. Le patient apprend progressivement à contrôler son excitation au cours de plusieurs types d’exercice. Les psychothérapies visent à renforcer la confiance du patient en sa performance sexuelle, à diminuer l’anxiété de performance, à améliorer la communication du couple et la qualité de la relation de couple.

Conclusion

Même si les progrès médicaux et pharmacologiques nous ont permis de mieux comprendre les problèmes de dysfonctionnement sexuels et éjaculatoires, il reste encore beaucoup à faire dans la prise en charge des patients et de leurs partenaires. Il faut lever les angoisses, les tabous et pousser les patients à consulter afin d’être aidé. L’écoute est essentielle et permet de mieux cibler le problème en fonction des plaintes permettant une prise en charge efficace et multidisciplinaire. Les inhibiteurs de la PDE 5 restent depuis leur introduction les médicaments de premiers choix utilisés par des millions de patients dans le monde grâce à leur efficacité et leur sécurité, malgré les bruits qui se font écho dans le grand public. L’arsenal thérapeutique s’est vu tout récemment renforcé grâce à la dapoxétine, médicament très prometteur dans le suivi des patients éjaculateurs précoces. Les prochaines décennies verront surement d’autres avancées en matière de traitement et de renforcement de prise en charge permettant une véritable révolution sexuelle mais bien différente de celle de l’époque hippie, puisque mieux comprise et adaptée aux besoins de l’homme moderne.

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