Vous êtes-vous déjà demandé quelle était la principale cause de décès dans le monde ? Il s’agit de l’hypertension artérielle. Environ un tiers de la population mondiale en souffre et seulement 50 % d’entre eux le savent. Plus choquant encore, après l’âge de 50 ans, près d’une personne sur deux souffre d’hypertension. La façon dont nous mesurons la pression artérielle a beaucoup évolué au fil du temps et continue de changer. Par exemple, la mesure de la pression artérielle centrale était autrefois invasive, mais la tonométrie à plat nous permet de placer un capteur devant la carotide ou l’artère radiale. Nous traitons toujours l’hypertension en nous basant sur des mesures brutes, mais ces nouveaux outils de diagnostic et la thérapie personnalisée permettent de repérer d’autres facteurs de risque et les lésions des organes finaux dans la phase préclinique.
Si vous voulez en savoir plus, continuez à lire l’article du Dr Patrice Marenco.
Définition moderne de l’hypertension artérielle
L’hypertension artérielle (HTA) est la première cause de mortalité dans le monde. Un tiers de la population mondiale est hypertendue, mais uniquement 50 % le savent, dont 1/3 seulement ont une pression artérielle (PA) correctement contrôlée.
La valeur normale de la pression artérielle est encore sujet de discussion entre les spécialistes pour une raison très simple : nous ne la connaissons pas vraiment. Elle a été arbitrairement définie en Europe comme étant une pression supérieure à 140/90 mmHg chez les adultes au cabinet du médecin, et cela quel que soit l’âge (en dehors des enfants). Cette valeur est arbitraire et pourrait faire croire que le risque cardiovasculaire lié à la pression artérielle ne commence qu’à partir de ces valeurs ? Il n’en est rien puisque l’on sait que ce risque (risque d’accident vasculaire cérébral, infarctus du myocarde, ou de développer une insuffisance rénale) commence pour des valeurs beaucoup plus basses, dès 115/75 mmHg, et augmente de façon linéaire avec la pression. La valeur normale de la PA ne dépend pas de l’âge. La pression systolique augmente progressivement avec l’âge en raison du vieillissement artériel alors que la pression diastolique varie très peu, ce qui aboutit à une augmentation croissante de la pression pulsée (Systolique –diastolique) au cours du vieillissement.
A partir de 50 ans, nous savons qu’une personne sur 2 est hypertendue. Les américains, suite à l’étude SPRINT publiée il y a 2 ans, viennent d’abaisser le seuil de l’hypertension artérielle à 130/80 mmHg. L’objectif est de130-140 mmHg pour les plus de 65 ans et moins de 80 ans. Ce n’est qu’à partir de 80 ans que l’objectif de pression est remonté à 150 mmHg sachant que l’on ne traite que lorsque la PA est > 160/90 mmHg essentiellement pour éviter le risque de chute en cas d’hypotension orthostatique.
Hypertension et troubles cognitifs précoces
Une grande étude épidémiologique sur plus de 8000 volontaires durant plus de 20 ans en France et au Royaume-Unis (étude Whitehall II publiée dans Eur Heart Journal) vient de montrer une augmentation accrue du risque de démence pour la tranche des 50-60 ans qui présentait une PA > 130 mmHg, par rapport aux personnes de même âge ayant une PA < 130 mmHg. L’augmentation du risque relatif est de + 45 %. Cette augmentation de risque était aussi présente chez les patients indemnes d’accidents cardiovasculaires mais très souvent porteurs de lésions cérébrales silencieuses et sub-cliniques (micro-saignements, micro lésions de la substance blanche). Par contre, il n’y avait pas d’augmentation du risque de démence chez les patients de 60-70 ans et 70-80 ans. Ceci s’explique par la durée d’exposition au risque. Si la PA ne devient > 130 mmHg qu’à 60 ans voire plus tard, le délai est trop court pour observer une démence. En conclusion, avoir une PA dite normale (< 140/90) à 50 ans, ne signifie pas que l’on est à l’abri du risque de démence qui commence à un niveau plus bas.
Diagnostic de l’hypertension artérielle : MAPA 24h
La Mesure Ambulatoire de la Pression Artérielle (MAPA 24h) est un incontournable pour le diagnostic exact et le traitement de l’hypertension artérielle. Il s’agit d’un examen non invasif durant 24 heures, qui permet un enregistrement quasi continue de la pression artérielle brachiale. L’une des problématiques majeures de la mesure de la PA est sa grande variabilité au cours des 24h, sans pour autant qu’il s’agisse d’une erreur de mesure ou d’anomalie technique. Pour cette raison, les valeurs mesurées à différents moments du quotidien du patient permettent de mieux évaluer les risques et de comprendre les augmentations normales ou pathologiques de la pression artérielle (détectée au préalable en milieu médical). Appelé aussi, par abus de langage, holter tensionnel, l’appareillage MAPA se compose d’un brassard huméral traditionnel relié à un boîtier électronique programmable et muni d’un système de gonflage automatique du brassard. L’examen de MAPA doit être effectué dans le cadre habituel de vie du patient, qu’il soit sur son lieu de travail, qu’il passe son temps à d’autres occupations, au domicile et pendant son sommeil.
L’une des problématiques de la mesure de la PA est sa grande variabilité au cours des 24h, sans qu’il s’agisse d’une erreur de mesure ou d’anomalie technique.
La Mesure Ambulatoire de la Pression Artérielle (MAPA) est indiquée dans diverses situations : confirmation d’une hypertension artérielle (quasi obligatoire). Avant d’initier un traitement et afin d’éviter le fameux effet « blouse blanche » pouvant fausser les données et s’assurer du caractère permanent de l’HTA. La MAPA est également indiquée pour étudier la variation de pression artérielle nocturne, pour rechercher une variabilité inhabituelle de la PA, mais aussi dans les cas où l’auto-mesure par le patient est impossible. Elle permet de dépister les hypertensions masquées (Hypertension au domicile mais pas au cabinet, et hypertension nocturne) qui représentent plus de 20% des hypertensions.
Par ailleurs, de nombreuses études ont démontré le bénéfice de cet examen pour prédire la survenue d’un accident cardiovasculaire : la pression artérielle mesurée sur 24 heures semble donc être un meilleur reflet du risque cardiovasculaire que la pression artérielle mesurée au cabinet du médecin.
Les nouveaux concepts : La pression artérielle centrale et la compliance artérielle
La mesure conventionnelle de la pression artérielle brachiale, lors de la consultation, a longtemps permis l’évaluation du risque cardiovasculaire au cours du suivi de l’hypertension artérielle. On ne doit plus se limiter à l’obtention de 2 chiffres de pression artérielle, mais à une courbe de pression.
De nombreuses études épidémiologiques ont prouvé que le niveau de pression brachiale est corrélé de façon forte, graduelle et indépendante, avec les accidents et la mortalité cardio- vasculaire. Cependant, cette technique a deux limites : la première est liée au fait que la mesure réalisée au cours de la consultation peut ne pas refléter la véritable pression artérielle de l’individu au cours de la journée (effet blouse blanche etc.). Cette première limite est résolue, en partie, par la mesure ambulatoire de la pression artérielle (MAPA-24h ou « Remler »).
Mesure de la pression artérielle centrale
La mesure de référence de la pression centrale est en principe invasive par cathétérisme cardiaque gauche, ce qui en limitait l’intérêt chez le patient hypertendu asymptomatique. La tonométrie d’aplanation a permis une mesure de la pression centrale en plaçant un capteur en regard de l’artère carotide ou radiale. Différents dispositifs sont actuellement disponibles issus de la recherche fondamentale, ils permettent la mesure non invasive de la pression centrale. Cet appareil est maintenant disponible (ex : Sphygmocor®).
Intérêt pronostic de la pression artérielle centrale
De nombreuses considérations physiologiques poussent à penser que la pression centrale est un marqueur plus robuste que la mesure conventionnelle brachiale concernant le pronostic cardiovasculaire. La plupart des études comparant ces deux paramètres sont en faveur de la pression centrale. La pression centrale a prouvé, à plusieurs reprises, une corrélation supérieure à la pression brachiale concernant l’atteinte des organes-cibles comme pour l’épaisseur intima-media carotidienne, ou l’hypertrophie du ventricule gauche. Une méta-analyse récente souligne que les pressions centrales systoliques et pulsées prédisent, de façon indépendante, les évènements cardiovasculaires et la mortalité toutes causes. Un travail récent, comparant la valeur pronostique (mortalité toutes causes et cardiovasculaire) de la pression centrale à la MAPA de 24 heures, n’a pas mis en évidence de différence significative entre ces deux méthodes de mesure. Les avantages combinés de la MAPA et de la mesure de la pression centrale pourront prochainement être réunis au sein d’un même dispositif de mesures grâce aux avancées technologiques actuelles. Il existe aujourd’hui un système (Remler) permettant de faire une mesure ambulatoire sur 24 heures de la pression centrale.
0 commentaires